Est-ce que vous pouvez nous expliquer la genèse de cette création, dont le premier volet, OCD Love, s’inspirait d’une performance de Neil Hilborn, poète slameur qui conte l’histoire d’un jeune homme qui souffre de troubles obsessionnels et dont la fiancée trouve trop difficile de partager cette vie avec lui et décide de s’en aller ?
Avant de parler de l’art, de la découverte de la performance, il y a quelque chose d’essentiel à dire. Sharon et Gai sont tombés amoureux l’un de l’autre et c’est vraiment la base de tout ce qui va suivre. Nous nous sommes rencontrés il y a douze ans et vraiment tout ce que nous faisons, le point de départ, c’est l’amour. Il faut aussi dire que Gai est le meilleur ami de ce musicien Ori Lichtik. Depuis quelques années, il est introduit dans notre famille. Nous avons une vraie connexion sur le plan humain, on aime ce qu’on fait. On est tout le temps dans ce côté plaisir et c’est vraiment la base de notre travail. Je ressens une connexion très forte à la structure des poèmes de Neil Hilborn. Plus la structure que le texte, quelque part. J’ai ressenti rapidement que la structure pourrait ressembler à une chorégraphie. J’ai de l’OCD, j’ai de l’amour donc pour moi c’est naturel.
OCD Love et Love Chapter 2 font partie d’une suite, est-ce que vous inaugurez un cycle ?
En ce qui me concerne, OCD Love est ma première vraie création, sans réserve. Ça venait des tripes, peut être que c’était trop cristallisé en moi et j’avais besoin que ça sorte. Si c’était resté en moi trop longtemps, ce serait devenu un problème. Pour ce nouveau chapitre, je me suis engagée à faire une série de travaux qui sont dans la continuité les uns des autres, comme les films de Lars Von Trier.
D’où vient cette idée ?
Je suis influencée et je me sens connectée aux réalisateurs de films, plus qu’aux chorégraphes. Les frères Cohen et Spike Lee font partie de ceux qui m’ont affectée.
Cette création est une création à deux… ?
Gai Behar : Cela va bien au-delà de nous deux. C’est un travail collectif même s’il faut savoir que tout le mouvement est issu du corps de Sharon, c’est vraiment son corps qui provoque la chorégraphie. Il n’y a pas d’improvisation, tout vient de Sharon. Dès le départ de ce processus créatif, notre ami musicien Ori Lichtik était à nos côtés. Il a fait la musique en direct et a pu travailler avec le mouvement afin que nous composions ensemble cette pièce.
Nous sommes habitués à voir dans vos pièces une gestuelle et un vocabulaire très déliés, très sensuels. Vous insérez également des tocs sur le plateau. Comment avez-vous travaillé avec ces mouvements désarticulés ?
Tout cela existe déjà : le coté sensuel, obsessionnel. Je voudrais souligner le fait que cette création est quelque chose de très privée. Il faudrait en tant que spectateur voir ça comme si vous étiez une petite souris dans une pièce, comme si vous regardiez de loin. Quelque part vous allez rentrer dans notre monde, vous allez faire partie de notre intimité. C’est comme si c’était un petit diamant magnifique que nous allons pouvoir découvrir ensemble.